L’autonomisation de la femme demeure un défi majeur au sein desnombreuses communautés de l’espace Kasaï. Une situation similaire chez les musulmans. Cependant, des femmes musulmanes s’engagentde plus en plus à aller au-delà des barrières cultureless et sociales pour garantir leur indépendance et leur épanouissement personnel. Cette quête d’autonomisation est non seulement un droit fondamental, mais elle s’inscrit également dans une vision plus large de l’égalité des sexes et du développement social.
Dans le cadre de ses actions avec son organisation, Sabina Kabulos’est efforcée d’acquérir des competences pour participer activement à la vie économique, sociale et politique, tout en respectant les principes de sa foi. Elle a réussi à dépasser les limites et à œuvrer pour l’autonomisation des femmes dans le territoire de Dibaya, au Kasaï-Central.
Une musulmane engagée pour l’autonomisation de la femme qui va au-delà des frontières traditionnelles imposées par la société. Prouvant que les principes de la foi, de justice et d’égalité peuvent être intégrés dans la vie quotidienne, même lorsque des obstacles culturels ou sociaux, semblent être insurmontables.
À travers l’éducation, l’entrepreneuriat, l’engagement social et politique, ainsi que la solidarité, les femmes musulmanes démontrentfinalement qu’elles sont prêtes à changer les mentalités et à construire un avenir plus égalitaire pour elles-mêmes et pour les générations futures.
Découvrez ainsi l’interview de Sabrina Kabulo pour saisir la portée de sa vision et de ses actions menées sur terrain au profit des femmes et des jeunes filles .
Femme d’Afrique: Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs et lectrices ?
Sabrina Kabulo Kibambe: Oui, je suis Madame Sabina KABULO Kibambe, Coordonnatrice de l’Ong Mamans An’sar du Congo (MAC)en sigle.
FA: Parlez-nous en peu de mots de votre parcours professionnel.
SKK: C’est pour moi un réel plaisir, une occasion pour vous remercier très cher journaliste. Avant toute chose, je tiens à préciser que je viens de très loin, tout a commencé dans les associations locales au sein de la communauté musulmane où j’ai créé une association pour la première fois en 2011, qui avait pour but de permettre le dialogue, la consolation et le vivre ensemble des femmes.
Ces dernières ont émis le vœu de me voir à la tête de leurs associations. Après l’obtention de mon diplôme de graduat, j’ai commencé ma carrière en tant que secrétaire à la SONAS. Cependant, j’ai ressenti le besoin de défendre les droits des femmes et des filles, en raison des diverses formes de violence qu’elles subissaient dans ma communauté.
Malgré la pluralité des associations féministes et féminines en RDC, et principalement au Kasaï-Central, j’ai été élue présidente (Coordinatrice) en 2018 comme Coordonnatrice par les membres du conseil d’administration de l’Ong MAC, réunie en assemblée générale élective que j’ai moi même fondée au Kasaï-Central, et depuis, je continue à défendre les droits des femmes et des filles.

FA: Qu’est-ce qui vous a motivée à créer cette structure ?
SKK: Comme je l’ai mentionné, ma motivation provenait de l’observation des nombreuses formes de violence que subissent les femmes et les filles de ma communauté, notamment la non-participation aux instances de prise de décision, les marriages précoces ou forcés, et les violences domestiques. Cela constitue une violation de leurs droits. Le but ultime de notre Ong est de défendre les droits des femmes et des jeunes filles, ainsi que de promouvoir la dignité humaine.
FA: Quelles sont les réalisations avez-vous accomplies depuis 2018 ?
SKK: Depuis 2018, la vie n’a pas été rose pour nous, car plusieurs personnes capables et expertes en matière de protection et promotion de droits des femmes existaient déjà au Kasaï-Central. Malgré leur présence, je me suis frayée un chemin pour apprendre et acquérir leurs expériences afin d’engager une lutte de tous les jours. Plusieurs réalisations ont été effectuées, entre autres, des séances de sensibilisation dans la communauté musulmane sur les violences basées sur le genre (VBG), l’éducation à la santé sexuelle et reproductive (EAS) et sur les droits des enfants et des filles.
Nous étions dans la cité Mulombodi où nous avons mené bon nombre d’actions et les plaidoyers pour que la femme et la jeune fille de cette contrée trouve le sourire et que leurs droits soient respectés.
Nous avons également organisé un forum avec les imams de la communauté musulmane sur la participation des femmes dans les instances de prise de décision, ainsi qu’un forum sur les normes socioculturelles néfastes. À travers notre persévérance, la lutte en 2023, a été notifiée par l’ONU Femmes/RDC pour exécuter un projet d’autonomisation des femmes dans un contexte post conflit à travers le financement du Fonds des femmes pour la paix et l’action humanitaire. C’est dans cette perspective que nous avons encadré des femmes et des filles à Dibaya dans des activités génératrices de revenus dans le cadre d’un projet d’appui aux femmes et filles du centre-kasaïennes,victimes de conflits, pour leur relèvement socio-économiques.
FA: Quelles sont les difficultés que vous rencontrez tant dans la gestion que dans l’animation au quotidien de votre structure ?
SKK: Nous faisons face à plusieurs difficultés. D’abord, le manque de financement stable limite nos capacités d’action et de sensibilisation et d’intervention. En plus, le non respect des droits humains, les inégalités du genre et le déséquilibre du pouvoir en RDC, complique notre travail, car certaines personnes perçoivent nos actions comme une menace pour leurs traditions. Enfin, la sensibilisation et l’éducation des communautés prennent du temps, et il est parfois difficile de mobiliser les personnes sur ces questions, surtout dans les zones rurales.
FA: Quelle est la situation sociale de la femme actuellement dans l’espace Kasaï ?
SKK: La situation sociale des femmes dans l’espace Kasaï est préoccupante. Beaucoup de femmes font face à des inégalités significatives en matière d’accès à l’éducation, à la santé et à des opportunités économiques. Les violences basées sur le genre, y compris les mariages précoces et les violences domestiques, restent courants. Qui plus est, la non-participation des femmes dans les instances de décision renforce leur marginalisation. Cependant, il y a une prise de conscience croissante et un désir de changement parmi les femmes et certains leaders communautaires. Plusieurs stratégies ne font que se multiplier chaque jour pour combattre ce phénomène.
Propos recueillis par Jean Claude Ngalamulume Bakamubia